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Jean SOULAT L’ÉTUDE TYPOCHRONOLOGIQUE DES FIBULES DE VICQ (YVELINES) : une véritable collection de référence Résumé Une des plus importantes nécropoles du haut Moyen Âge en Europe a fait l’objet de nombreuses opérations archéologiques depuis plus d’un siècle sur la commune de Vicq (Yvelines). La nécropole se situe au lieu-dit « le Radet, les Terres à Froment », à quelques mètres seulement au nord du cimetière actuel. Elle a notamment livré une quantité impressionnante de mobilier funéraire mérovingien : éléments de parure prestigieux, verreries ou encore céramiques. Cet article met en évidence les ibules à travers leur étude typochronologique. Elles constituent, par leur nombre et leur variété, une véritable collection de référence pour la recherche en archéologie mérovingienne. Mots-clés Vicq, ibule, nécropole, mérovingien, typologie. Abstract For more than a century, numerous archaeological excavations have been carried out at Vicq, site of one of the largest early medieval cemeteries in Europe. The cemetery is located at “Le Radet, les Terres à Froment” only a few metres to the north of the present-day grave-yard. Excavations have produced a remarkable quantity of Merovingian grave goods: high-status dress accessories, glass-ware and pottery. The chronological and typological study presented here highlights the brooches which, given their number and variety, constitute a true reference collection for research in Merovingian archaeology. Keywords Vicq, brooch, cemetery, Merovingian, typology. Zusammenfassung Eines der wichtigsten frühmittelalterlichen Gräberfelder Europas, das in der Gemeinde von Vicq (Yvelines, France) liegt, wird seit mehr als einem Jahrhundert durch zahlreiche archäologische Untersuchungen erforscht. Das Gräberfeld befindet sich im Bereich der Flurbezeichnung „le Radet, les Terres à Froment“ nur einige Meter nördlich des heutigen Friedhofs. Die Nekropole hat eine bedeutende Zahl merowingerzeitlicher Grabbeigaben geliefert: Wertvolle Bestandteile des Trachtschmucks, Glasfunde sowie auch Keramik. Im Rahmen dieses Artikels werden die Fibeln im Rahmen einer typochronologischen Studie behandelt. Sie stellen was ihre Anzahl sowie ihre Verschiedenheit betrifft, eine bemerkenswerte Referenzkollektion für die Erforschung der Archäologie der Merowingerzeit dar. Stichwörter Vicq, Fibel, Gräberfeld, Merowingerzeit, Typologie. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 233 Jean SOULAT Figure 1 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Plan de la nécropole mérovingienne. [© Plan : E. Servat, F. Zuber ; DAO : V. Maret, Sady] 234 Figure 2 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Plan des fouilles archéologiques menées dans le centre-ville. [© DAO : J. Soulat, Sady] RAIF, 9, 2016, p. 233-260 L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence ÉTAT DES FOUILLES Entre 1857 et 1998, la nécropole a fait l’objet de nombreuses interventions archéologiques, notamment entre 1976 et 1987 sous la conduite d’Edmond Servat, à l’occasion de la construction de pavillons (SERVAT 1986). Au total, ce sont près de 2 141 sépultures qui y ont été recensées (figure 1). Le site, s’étendant sur une surface de plus de deux hectares, est estimé à environ 5 000 individus, probablement datés des périodes mérovingienne et carolingienne. Son emprise totale reste à préciser, mais un diagnostic effectué en juillet 2015 sur la parcelle 292, à moins de 30 m au sud-est de la nécropole, a permis d’évaluer ce qui pourrait être la limite sud-est de la nécropole. Une vingtaine de sépultures y ont été repérées et permettent, d’après deux sarcophages en pierre et quelques objets, de dater ce secteur des vie-viie siècles (SOULAT dans GRANCHON 2015 ; figure 2). D’après les premiers éléments de datation, il semble que la première phase d’occupation de Vicq, dite mérovingienne, soit bien attestée en fonction du mobilier exhumé, avec un phasage qui s’étend de la deuxième moitié du ve à la première moitié du viie siècle. À quelques mètres à l’ouest du cimetière actuel, sur la parcelle 306, plusieurs rangées de sarcophages en plâtre ont été repérées lors de la plantation d’arbres en 1851 (MOUTIÉ 1857, p. 242-243 ; figure 2). Des reliefs, des inscriptions ainsi que divers objets comme des haches, des lances et des couteaux auraient été mis au jour. Si ces observations s’avéraient juste, cela suggérerait une étendue de la nécropole mérovingienne jusqu’à l’église Saint-Martin. Confirmant cette hypothèse, deux campagnes de fouille ont été menées par E. Servat entre l’église et l’école de 1984 à 1986 (SERVAT s.d. ; figure 2). De nombreuses tombes sans mobilier, orientées de la même manière que celles de la nécropole, ont été retrouvées. Dans ce secteur, on a notamment découvert des sarcophages en plâtre de forme trapézoïdale, des tessons de céramiques mérovingiens et un antéfixe marqué d’une croix de Saint-André en terre cuite similaire à celui retrouvé dans la nécropole. Les sépultures sans mobilier, dont certaines sont en sarcophage de plâtre, sont difficiles à dater et peuvent appartenir à une période allant du viie au xiiie siècle, chronologie d’utilisation de ce type de contenant. En complément des vestiges mérovingiens de la nécropole, on retrouve sur les parcelles 122 et 289, situées au sud-est du diagnostic de 2015 (figure 2), des résidus d’occupation d’un habitat mérovingien du vie siècle concentré au sud-ouest de la zone et matérialisé par un ou deux fonds de cabane, où l’on a retrouvé un tremissis (DESCHAMP en cours). Cet habitat mérovingien a été recoupé par les occupations carolingienne, médiévale et moderne. DESCRIPTION DES TOMBES Sur toute l’étendue de la nécropole, une très grande quantité de sépultures, toutes des inhumations, ont été repérées. Orientées NO/SE, tête à l’ouest, plusieurs catégories d’architecture funéraire sont à relever, même si dans la plupart des cas, les défunts sont inhumés en fosse simple sur un brancard en bois mais plus généralement à même le sol. De nombreux sarcophages ont été inventoriés, plus d’une centaine en calcaire et près de 259 en plâtre. Certains sarcophages en pierre ont été confectionnés à partir de blocs d’architecture gallo-romaine, notamment celui de la tombe 475 qui a livré un décor de pattes de fauve encadrant une amphore. Différentes formes sont présentes : rectangulaire, trapézoïdale ou encore naviforme. Ils sont généralement disposés en rangée et systématiquement violés, donc brisés, en particulier les couvercles. La grande majorité peut être datée du vie siècle. Les sarcophages de plâtre sont tous de la même forme, c’est-à-dire trapézoïdaux. Un secteur, dans la zone nord-est du cimetière (lot 8), a livré plusieurs rangées de sarcophage en plâtre formant un éventail et pouvant avoir une orientation différente des autres tombes. Il s’agit d’un des secteurs les plus récents de RAIF, 9, 2016, p. 233-260 235 Jean SOULAT la nécropole que l’on peut dater du viie siècle. De nombreuses violations sont également à noter dans presque 30 % des cas, soit 396 pillages attestés et 186 probables (NOTERMAN 2015). Ce taux estimé de 30 % est de loin le plus haut au sein des nécropoles d’Île-deFrance, comparaison comprenant Lagny-sur-Marne (Seine-et-Marne), Nanterre (Hautsde-Seine), Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) et Gaillon-sur-Montcient (Yvelines). PRÉSENTATION DU MOBILIER Le mobilier funéraire déposé dans les tombes se singularise par une diversité assez déconcertante pour une nécropole francilienne (SOULAT 2013, p. 127-128 ; figure 3). De nombreuses tombes à arme ont été recensées à Vicq puisque 156 armes sont présentes dont 68 haches, 28 fers de lance, 38 fers de flèche, 6 épées, 13 scramasaxes, 1 fauchard et 2 umbos (partie centrale du bouclier ; figure 4). Il faut également ajouter 8 éperons en fer, témoins probables de l’inhumation de cavaliers. Les tombes féminines mérovingiennes sont souvent dotées de multiples éléments de parure, signes de l’opulence d’une certaine élite. 96 fibules ont été découvertes sur le site de Vicq. En complément de ces fibules, 51 boucles d’oreille de forme polyédrique, généralement en argent avec incrustation de verroterie et de grenats, ont été inventoriées dans les tombes féminines. 60 bagues font également partie de l’inventaire, chiffre assez conséquent pour la région. Il faut également ajouter la présence de 90 plaques-boucles et 477 boucles de ceinture ou de lanière. Parmi les autres éléments de parure, on compte également 1 837 perles. Enfin, de nombreux récipients ont été déposés dans les tombes : 262 vases en céramique, 62 verreries et une aiguière en alliage cuivreux. Parmi les céramiques, on retrouve des vases carénés décorés à la molette, des vases globulaires, des bouteilles également décorées, des cruches, mais aussi quelques exemplaires de poteries de tradition gallo-romaine. Au sein des verreries, plusieurs catégories sont à noter comme des coupelles, des gobelets, des flacons et des vases campaniformes. 236 Figure 3 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Catégories de mobilier. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence Figure 4 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Types d’armes. ÉTUDE TYPOCHRONOLOGIQUE DES FIBULES Au total, 96 fibules ont été découvertes sur le site de Vicq réparties dans 36 tombes. Elles se divisent en dix catégories : 5 fibules ansées asymétriques, 21 fibules ansées digitées, 5 fibules ansées symétriques, 42 fibules aviformes, 2 fibules discoïdes, 1 fibule en rosette, 7 fibules quadrilobées, 2 fibules en S et 2 en cavalier, ou encore 9 fibules gallo-romaines (figure 5). Nous ne détaillerons pas l’étude des fibules gallo-romaines dans cet article. Figure 5 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Types de fibules. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 237 Jean SOULAT Parmi les fibules mérovingiennes, on compte 32 types différents. 20 tombes livrent une paire de fibules dont quatre ansées digitées (soit 8 fibules) et 12 aviformes (soit 24 fibules), une tombe propose trois fibules (deux ansées digitées et une aviforme) et quatre tombes offrent deux paires de fibules. Pour ces dernières, trois tombes rassemblent une paire de fibules ansées digitées et une paire de fibules aviformes, tandis qu’une autre livre deux paires de fibules ansées digitées. Toutes les fibules peuvent être datées entre le milieu du ve et la deuxième moitié du vie siècle, à l’exception des fibules gallo-romaines. L’étude typologique et la datation de certaines de ces fibules ont déjà fait l’objet de publications. À ce titre, il faut mentionner l’étude aujourd’hui un peu dépassée de Wimm H. Wimmers publiée en 1993 qui constitue tout de même une base solide car elle présente toute les catégories de fibules de Vicq (WIMMERS 1993, p. 21-33). En complément, il faut évoquer le remarquable travail d’Alexander Koch, publié en 1998, sur les fibules ansées asymétriques, sur lequel s’appuie largement notre article et qui livre la typologie la plus aboutie. Complétant cette dernière, il faut citer l’excellent article de Françoise Vallet paru en 1997 (VALLET 1997, p. 219-244) qui aborde les fibules les plus précoces, datées de la seconde moitié du ve siècle, évoquant ainsi trois fibules localisées à Vicq. Pour les fibules aux influences exogènes, quatre articles permettent de faire le tour de la question en matière de typochronologie et de parallèles. On peut évoquer, pour les fibules de type wisigoth, les travaux de Volker Bierbrauer (BIERBRAUER 1997, p. 167-200) et de Michel Kazanski (KAZANSKI, PÉRIN 1997, p. 201-217), tous deux publiés en 1997. Pour les fibules de type gépide, il faut citer l’article de M. Kazanski sur les Gépides en Gaule publié en 2010 (KAZANSKI 2010, p. 127-139) tandis que pour les fibules de type thuringien, il faut se référer à l’article très complet de Jan Bemmann publié en 2008 (BEMMANN 2008, p. 145-227). Enfin, en matière de phasages typochronologiques pour la Gaule mérovingienne, le présent article utilise la Chronologie normalisée du mobilier funéraire mérovingien entre Manche et Lorraine publiée en 2004 et rééditée en 2009 par René Legoux, Patrick Périn et Françoise Vallet (LEGOUX et alii 2009). 238 Les fibules ansées asymétriques Cinq fibules ansées asymétriques, datées du milieu du ve siècle, sont à noter. Parmi elles, on compte une fibule en alliage cuivreux à tête triangulaire et à corps losangique marqué de cercles concentriques, provenant de la tombe 504 et appartenant à un type peu courant. Une paire de fibules en alliage cuivreux à tête triangulaire, à trois digitations et à corps losangique également à trois digitations, a été retrouvée dans la tombe 697, se rapprochant du type 255 (LEGOUX et alii 2009, p. 39). Enfin, une paire de fibules en fer en arbalète se composant d’une surface à cannelure provient de la tombe 1924. La fibule de la tombe 504 est très particulière (figure 6). Mesurant 6,2 cm de long, elle se compose d’une tête triangulaire encadrée par deux sillons sur le pourtour et dont le centre est marqué par un double cercle concentrique pointé. L’anse est de section tronconique et possède une nervure médiane appuyée par un double cercle concentrique pointé. Le corps losangique est traité de la même manière que la tête avec un double sillon sur le contour à l’intérieur duquel on retrouve trois doubles cercles pointés. Entre l’anse et le début du corps, on remarque deux petits œillets à contour digité. Le pied de la fibule est également accentué par deux digitations. Cette fibule constitue une variante des fibules type Bifrons-Preures (VALLET 1997, p. 228, 236) qui comportent des têtes semi-circulaires à trois digitations et dont les exemplaires se répartissent de part et d’autre des côtes de la Manche. À ce titre, on peut citer une paire provenant de la nécropole de Bifrons dans le Kent en Angleterre (HAWKES 2000, p. 71), une paire issue de la tombe 124 de Vron dans la Somme (SEILLIER 1992, p. 105), une autre paire dans la tombe 75 de Preures dans le Pas-de-Calais (CRÉPIN 1957), une fibule dans la tombe 18 de Noeux-les-Mines dans le Pas-de-Calais (SEILLIER 1994, p. 79-80), une fibule dans la tombe 2 de Hérouvillette RAIF, 9, 2016, p. 233-260 L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence 239 Figure 6 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Fibules ansées asymétriques. [© J. Soulat] RAIF, 9, 2016, p. 233-260 Jean SOULAT VICQ 0 Figure 7 – Carte de répartition des fibules du type Bifrons-Preures et de type Bulles-Lauriacum. [DAO : F. Tessier, d’après VALLET 1997 actualisant KOCH 1998] 240 dans le Calvados (DECAENS 1971, p. 70-71) ou encore une dernière provenant de la villa gallo-romaine du Fort de la Bosse Marnière de Limetz-Villez dans les Yvelines (BARAT 2007, p. 213 ; figure 7). Les fibules du type Bifrons-Preures semblent refléter une influence de type germanique voire saxon (SOULAT 2009, p. 44-45) et sont datées du milieu du ve siècle, soit du début de la phase Proto-Mérovingien (PM), précisément entre les années 440-450. La fibule de la tombe 504 de Vicq peut sans problème être intégrée à cette période. La paire de fibules de la tombe 697 apparaît également comme singulière. Les deux fibules identiques mesurent 4,6 cm de long et se composent d’une tête triangulaire à trois digitations marquées de plusieurs cercles concentriques. L’anse de section tronconique est courte soulignée par plusieurs cannelures. Le corps losangique est décoré de cercles concentriques et se termine par trois digitations. Ces deux fibules se distinguent par leur absence de parallèles en Gaule mérovingienne. Cependant, leur forme et leur décor rappellent les fibules du type Bifrons-Preures et du type Bulles ou Gondorf ce qui permet de dater cette paire de fibules du milieu du ve siècle. Il s’agit d’un type hybride, une variante. Enfin, la paire de fibules de la tombe 1924 est plus courante. Les deux fibules en arbalète se composent d’une surface à cannelure. Elles font partie d’un type bien représenté dans le nord de la Gaule et en Espagne comme c’est le cas à Mondeville dans le Calvados, SaintPierre-du-Vauvray dans l’Eure (BIERBRAUER 1997, p. 186-187), dans la tombe 529 de Frénouville dans le Calvados ou dans la tombe 303 de Nouvion-en-Ponthieu dans la Somme. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 100 200 km L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence Les fibules ansées à trois digitations Six fibules ansées à trois digitations sont datées de la deuxième moitié du ve siècle. On retrouve ainsi une paire de petites fibules à trois digitations et à corps triangulaire du type Bulles / Lauriacum (VALLET 1997, p. 236 d’après KOCH 1998) provenant de la tombe 689. Deux autres paires de fibules à trois digitations recouvertes d’un placage en tôle d’argent de type 263 (LEGOUX et alii 2009, p. 39) d’influence wisigothique ont été retrouvées dont une dans la tombe 756 et une autre dans la tombe 962. Les deux petites fibules en argent doré de la tombe 689 se composent d’une tête semicirculaire à trois digitations marquée par un contour décoré d’une série de triangles niellés à l’origine mais dont le remplissage est désormais manquant (figure 8). Mesurant 4,2 cm de long, deux motifs amandiformes en taille biseautée sont présents à l’intérieur de la tête et séparés par l’anse aux extrémités en pointe. Le corps de la fibule est triangulaire et orné par deux triangles en sillon qui s’emboîtent, dont le plus grand est composé d’un ornement perlé. Chaque angle du corps est marqué par une digitation. Elles appartiennent au type Bulles-Lauriacum et se localisent notamment dans la tombe 60 de Bulles (Oise) et dans les tombes 32A et 121A de Vron (Somme), mais également dans la vallée rhénane (VALLET 1997, p. 235-236 ; figure 7), et sont datées de la deuxième moitié du ve siècle. 241 1 cm (1/1) Figure 8 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Paire de fibules ansées à trois digitations de la tombe 689. [© F. André] Les deux fibules ansées à trois digitations en alliage cuivreux recouvertes de placage en tôle d’argent provenant de la tombe 756 sont dans un parfait état après restauration (figure 9). Mesurant 16,7 cm de long, la tête semi-circulaire est accentuée par des bords droits des deux côtés. Elle est associée à de fines tôles d’alliage cuivreux doré rivetées, rectangulaires pour les digitations des côtés et à bec d’oiseau pour la digitation sommitale. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 Jean SOULAT 242 1 cm Figure 9 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Assemblage provenant de la tombe 756. [© P. Pierrain] RAIF, 9, 2016, p. 233-260 (1/1) L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence L’anse en pointe est soulignée, de part et d’autre, par des plaques rivets semi-circulaires. Le corps est rectangulaire et se termine par une extrémité arrondie. Les deux fibules ansées similaires retrouvées dans la tombe 962 sont dans un état plus lacunaire. Également en alliage cuivreux, recouvertes d’une tôle d’argent, elles mesurent environ 20 cm de long. La tête semi-circulaire est incomplète et accentuée par des bords droits des deux côtés. L’anse n’est pas conservée. Le corps losangique très mal conservé semble être recouvert d’une fine tôle d’alliage cuivreux. Ces quatre fibules d’influence wisigothique appartiennent au type 263 (LEGOUx et alii 2009, p. 39) et plus précisément au type E (KAZANSKI, PÉRIN 1997, p. 211-212) pouvant ainsi être datées de la seconde moitié du ve siècle. Des exemplaires similaires se localisent dans la moitié nord de la Gaule et en péninsule ibérique (Ibid., p. 211-212). Cependant, les meilleures comparaisons en Gaule ont été retrouvées dans la tombe 275 de Maule dans les Yvelines (SIRAT 1978, p. 106-107), dans la tombe 140 de Nouvion-en-Ponthieu dans la Somme (PITON 1985, p. 74-75), à Envermeu en SeineMaritime (KAZANSKI, PÉRIN 1997, p. 211-212) ou encore à Marchélepot dans la Somme (Ibid., p. 211-212). Les fibules ansées de cinq à sept digitations Quinze fibules ansées digitées en alliage cuivreux ou argent parfois doré ont été inventoriées et se répartissent au sein de douze tombes. Cinq types se distinguent. Trois fibules à cinq digitations à corps losangique du type 264 dit de « Douai » dont une paire provient de la tombe 689 et une seule dans la tombe 343. Une paire de fibules à cinq digitations à corps losangique du type iii.3.6.1.1 a été localisée dans la tombe 115. Cinq fibules à cinq digitations à tête à décor quadrillé ou à rayons et à corps rectangulaire du type 269 ont été découvertes dont une paire dans la tombe 602, une autre dans la tombe 814 et une seule fibule dans la tombe 1603. Trois fibules à cinq digitations à tête à décor de volutes et à corps rectangulaire du type 270 peuvent être mentionnées avec une paire dans la tombe 818 et une seule fibule dans la tombe 838. Enfin, une paire de fibules à sept digitations et à corps trapézoïdal richement décorée provient de la tombe 1930 dont un des deux exemplaires est de type lombard. Trois fibules du type 264 dit de « Douai » proviennent donc des tombes 343 et 689 (figure 6). Mesurant 7,6 cm de réalisé en taille biseautée. La tête semi-circulaire à cinq digitations livre un décor composé de deux S s’affrontant du type volute. Le dessus de l’anse est serti d’un grenat circulaire entouré de segments incisés associés à des pointillés. Le corps losangique est orné d’un masque anthropomorphe stylisé positionné à l’inverse du masque zoomorphe représenté sur le pied. La fibule de la tombe 343 mesure 7,2 cm de long et se compose de cinq digitations et à corps losangique en alliage cuivreux doré. La tête semi-circulaire digitée livre un décor au traitement mal maîtrisé, composé de deux S s’affrontant. Le dessus de l’anse comporte une série de pointillés. Le corps, losangique, est orné d’un masque anthropomorphe stylisé, positionné à l’inverse du masque zoomorphe représenté sur le pied. D’après la facture, le matériau utilisé et l’ornementation moulée maladroite, il semble apparaître que cet exemplaire soit en fait une copie des fibules dites du type « Douai ». Ces fibules appartiennent à un type qui se concentre essentiellement dans le nord de la Gaule et plus particulièrement autour de la vallée de la Seine (KOCH 1998, vol. 2, pl. 28). On retrouve des exemplaires à Douvrend en SeineMaritime (LORREN 2001, p. 38-40, pl. 2), Saint-Pierre-du-Vauvray dans l’Eure (LORREN 2001, p. 38-40, pl. 2), Delincourt dans l’Oise (KOCH 1998, vol. 2, pl. 28), à Longnes dans les Yvelines (BARAT 2007, p. 214) ou encore dans la tombe 92 de Mill Hill dans le Kent en Angleterre (PARFITT, BRUGMANN 1997). D’après les comparaisons, ces fibules peuvent être datées du début du vie siècle, soit de la deuxième moitié du MA1 (500-530). RAIF, 9, 2016, p. 233-260 243 Jean SOULAT VICQ 0 100 200 km 0 100 200 km 244 VICQ variante variante Figure 10 – Cartes de répartition des fibules ansées à cinq digitations du type 269. [DAO : F. Tessier, d’après KOCH 1998] RAIF, 9, 2016, p. 233-260 L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence La paire de fibules de la tombe 115 est en argent doré (figure 6). Mesurant 9,2 cm, il s’agit de fibule ansée à cinq digitations à corps losangique en argent doré. La tête semicirculaire à digitations massives livre un décor semi-circulaire en zigzag, entouré d’un ornement perlé. Le contour est décoré d’une série de petits triangles niellés. Le dessus de l’anse comporte une limitation rectiligne centrale, sur laquelle est présente une série des mêmes triangles niellés. De part et d’autre, des lignes d’ornement perlé sont associées. Le corps losangique est traité de la même manière et s’articule autour d’un petit losange central entouré d’une frise en méandre. Le contour décoré de triangles niellés est serti par des petits grenats circulaires absents dont ne subsistent que les champs vides. Terminant la fibule, le pied se compose d’un masque zoomorphe. Ces deux fibules font partie du type iii.3.6.1.1 d’influence gépide (KOCH 1998, p. 224-225) et s’assimilent aux fibules des tombes 50 et 81 de Szentes-Kökényzug (Hongrie), à celle de San Andrea di Grottamare (Italie) ou encore à celle de Pavia (Italie) (KAZANSKI 2010, p. 130). Elles peuvent être datées de la première moitié du vie siècle, soit du MA1. Six fibules ansées à cinq digitations à plateau à décor quadrillé ou rayonnant appartenant au type 269 ont été inventoriées dont une paire dans la tombe 602, une autre dans la tombe 814 et une seule fibule dans la tombe 1603 (figure 6). Mesurant 7 cm de long, les deux fibules de la tombe 602 sont en alliage cuivreux et livrent une tête semi-circulaire à décor rayonnant. L’anse est simple, marquée de sillons sur les bords. Le corps, de forme rectangulaire, est délimité par un double sillon qui entoure une série de quatre points. Mesurant 7,5 cm de long, la paire de fibules de la tombe 814 est en argent doré avec des digitations serties de grenats circulaires. La tête semi-circulaire est remplie d’un décor rayonnant entouré d’un ornement perlé et de deux sillons. L’anse, comme le corps rectangulaire, est décorée d’une ligne argentée ornée d’une série de triangles niellés se terminant vers le pied par un entrelacs. Après l’anse, de chaque côté de cette ligne, on retrouve une série de zigzags en relief. Mesurant 8,2 cm de long, la fibule de la tombe 1603 est en alliage cuivreux et ses digitations sont serties de grenats circulaires. La tête semicirculaire est remplie d’un décor en croisillon entouré d’un sillon. L’anse, comme le corps rectangulaire, est décorée d’un champ rectiligne en relief entouré de lignes verticales et de chevrons. Le pied rectangulaire se termine par un champ semi-circulaire serti d’un grenat. Toute l’ornementation de la fibule est moulée. Pour les fibules à plateau à décor rayonnant, les parallèles les plus proches se rencontrent dans la tombe B de Cormettes dans le Pas-de-Calais), à Trivières et à Harmignies en Belgique (KOCH 1998, vol. 2, pl. 10) tandis que la fibule à plateau à décor quadrillé, se rapproche d’exemplaires présents à Trivières en Belgique, dans la tombe 142 de Dieue-sur-Meuse dans la Meuse, à Warlus dans le Pas-de-Calais et aussi en Picardie (KOCH 1998, vol. 2, pl. 17-19 ; figure 10). Même si le plateau décoré n’est pas similaire, la datation de ces fibules reste étendue entre les phases MA1 et MA2, soit entre la fin du ve et le dernier tiers du vie siècle. Trois fibules ansées à cinq digitations à plateau à décor de volutes et à corps rectangulaire du type 270 peuvent être comptées, avec une paire dans la tombe 818 et une seule fibule dans la tombe 838 (figure 6). Mesurant 6,8 cm de long, les deux fibules de la tombe 818 sont en alliage cuivreux doré. La tête semi-circulaire est remplie d’un décor de volute entouré d’un sillon. L’anse, comme le corps rectangulaire, est décorée d’un champ rectiligne en relief entouré de chevrons et de lignes verticales et horizontales. Le pied rectangulaire se termine par un décor de triangle. Toute l’ornementation de la fibule est moulée. Mesurant 6,6 cm de long, la fibule de la tombe 838 en alliage cuivreux doré est quasiment identique aux deux précédentes. Il semble qu’il s’agisse d’une copie moins bien exécutée comme le suggère le profil général approximatif et le décor de facture plus grossière. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 245 Jean SOULAT VICQ 0 Figure 11 – Carte de répartition des fibules ansées à cinq digitations du type 270. [DAO : F. Tessier, d’après KOCH 1998] 246 Les fibules du type 270 se retrouvent dans le nord de la Gaule comme c’est le cas dans la tombe 887 de Cutry (Meurthe-et-Moselle), à Compiègne (Aisne) ou encore à Bry-surMarne (Seine-et-Marne) (KOCH 1998, vol. 2, pl. 4 ; figure 11). Comme pour le type 269, la datation de ces fibules s’étend entre la fin du MA1 et le MA2. Enfin, une paire de fibules à sept digitations et à corps trapézoïdal richement décoré provient de la tombe 1930 (figure 6). La première fibule ansée, qui mesure 8,7 cm, est en argent doré. Sur les sept digitations massives, cinq sont conservées. La tête semicirculaire est ornée d’un décor d’entrelacs entouré de deux sillons. L’anse ainsi que le corps amandiforme de la fibule sont décorés de la même manière. Le pied se compose d’un masque zoomorphe stylisé associant deux yeux amandiformes, un nasal imposant et un museau arrondi. Le système d’attache présent au revers est complet et est recouvert de textile. Cette fibule fait partie du type iv.1.1 (KOCH 1998, vol. 2, pl. 38), assez courant dans la vallée du Rhin et se rencontre notamment à Besançon dans le Doubs (KOCH 1998, vol. 2, pl. 8) et dans la tombe 49 d’Erstein dans le Bas-Rhin (Catalogue d’exposition 2004, p. 37-39), mais également en Italie à Ravenne (ABERG 1923) ce qui permet de supposer une influence lombarde. Mesurant 7,6 cm, la seconde fibule de la tombe 1930 est également en argent doré. Sur les sept digitations massives, seules quatre sont conservées. La tête semi-circulaire semble avoir subi une réparation, puisqu’un arc semi-circulaire perforé en fer sert de renfort aux digitations. Le champ semi-circulaire de la tête est serti, au centre, d’un grenat trapézoïdal entouré de chaque côté d’une volute et d’un sillon torsadé. Le contour RAIF, 9, 2016, p. 233-260 100 200 km L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence extérieur de la tête est orné d’une série de triangles niellés. L’anse est chargée en décoration puisqu’elle comporte un champ rectangulaire vide mais qui, à l’origine, devait recevoir une verroterie ou un grenat. Au-dessus et en-dessous de ce champ se trouve une bande rectiligne dont le centre est orné de deux séries de triangles niellés. De part et d’autre de cette bande, on retrouve un décor moulé composé de quatre yeux amandiformes. Comme le reste de la fibule, le corps et le pied sont également richement décorés, avec un contour orné d’une double série de triangles niellés. À l’intérieur du corps, trois grenats sont présents, le premier étant trapézoïdal et les deux autres en forme de goutte. Le contour interne du corps ainsi que les contours externes des gouttes en grenat se composent de sillons torsadés. Les champs vides entre les grenats sont remplis de volutes en relief. Le corps de la fibule vient se terminer par un pied à double arrondi surmonté par deux têtes de rapace stylisé avec l’œil et le bec crochu. À l’envers, le pied retranscrit la vision de deux fibules aviformes. Cette fibule appartient à un type lombard, dont les meilleurs parallèles se localisent dans le Kent (Angleterre) avec une paire de fibules découverte hors contexte et faisant partie de la collection Thomas Bateman du British Museum. Le pied caractéristique avec les têtes d’oiseaux s’affrontant et l’association des grenats en forme de goutte se rencontrent également dans la fibule d’une tombe de Broechem (Anvers) en Belgique (ANNAERT, SOULAT 2015) mais aussi sur une autre à Mühlhausen (Thuringe) en Allemagne (HARDY 2006, p. 154). Enfin, la fibule de Vicq se rapproche d’un exemplaire de Chuisi (Toscane) en Italie (ABERG 1923). D’après sa forme et son ornementation, cette fibule peut être datée entre la fin du MA1 et le MA2. Les fibules ansées symétriques Cinq fibules ansées symétriques en alliage cuivreux ont été découvertes à Vicq : une dans la tombe 801, deux dans la tombe 851, une dans la tombe 1624 et une dernière dans la tombe 1832. À l’exception des deux petites fibules de la tombe 851 datées entre la fin du ve et le début du vie siècle, toutes les autres peuvent être datées du viie siècle. La fibule ansée symétrique en alliage cuivreux issue de la tombe 801 se compose d’un corps à cannelure avec une anse centrale proéminente. Mesurant 4,3 cm de long, elle fait partie du type xA6 (THÖRLE 2001, pl. 48). Les exemples les plus proches se localisent à Magnicourt-en-Comté dans le Pas-de-Calais ou à Rosny-sur-Seine dans les Yvelines et peuvent être datés du milieu du viie siècle. Une fibule ansée symétrique, en alliage cuivreux étamé, provenant de la tombe 1624, est plus massive que la précédente. Faisant 6,1 cm de long, elle livre une anse simple en U associée à deux plateaux circulaires marqués par quatre ocelles incisés à point central. Elle appartient au type II.C.1 et se rapproche des fibules de La Panne (Flandre Occidentale) en Belgique et de la tombe 21 d’Andrésy dans les Yvelines qui peuvent être datées du milieu du viie siècle (THÖRLE 2001, pl. 60). Une fibule ansée symétrique en alliage cuivreux a été retrouvée dans la tombe 1832. Mesurant 3,3 cm de long, elle est constituée d’une petite anse en U associée à deux plateaux scutiformes et appartient au type I.A.1 (THÖRLE 2001, pl. 2). Elle est similaire à de nombreux exemplaires mis au jour entre le nord de la Gaule et la vallée de la Meuse et peut être datée de la première moitié du viie siècle (THÖRLE 2001, pl. 60). Enfin, mesurant 2,5 cm de long, deux petites fibules ansées symétriques en alliage cuivreux ont été découvertes dans la tombe 851. Constituées de trois digitations serties de verroteries jaunes, elles sont thuringiens, appartenant au type 256 (LEGOUx et alii 2009, p. 39). Des exemplaires similaires ont été rencontrés à Bifrons (Kent) en Angleterre (HAWKES 2000, p. 71), dans la tombe 109 de Quiéry-la-Motte dans le Nord (LOUIS 2010, p. 75), à Gondrecourt-le-Château dans la Meuse (Information inédite de J. Guillaume, Musée barrois de Bar-le-Duc, fouilles E. Pierre du xixe siècle, no inventaire 887. 31. 6) mais également dans la vallée rhénane ainsi qu’en Thuringe (BEMMANN 2008, p. 188). Ce type de fibules peut être daté entre le dernier tiers du ve et le premier tiers du vie siècle, soit de la phase MA1. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 247 Jean SOULAT 248 Figure 12 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Quelques fibules aviformes. [© J. Soulat] RAIF, 9, 2016, p. 233-260 L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence Les fibules aviformes Au total, 42 fibules aviformes ont été inventoriées au sein de 26 tombes. Dans 16 d’entre elles, on retrouve une paire de fibules. Huit types se distinguent, rassemblant 36 fibules tandis que trois paires de fibules font partie d’un type inconnu. Neuf fibules aviformes appartiennent au type 238 dit de « Cutry » (LEGOUx et alii 2009, p. 38). Elles se rencontrent dans les tombes 146, 878 (figure 12), 948, 1225, 1352 et 1880. Une paire de fibules est présente dans les tombes 878, 1225 et 1352. Il s’agit de petites fibules, mesurant entre 2,4 et 3,2 cm de long, en alliage cuivreux ou en argent. Elles livrent une tête à œil circulaire serti d’un grenat pas toujours conservé et d’un petit bec crochu. Le corps allongé et de facture simple associe sur le ventre une petite serre semicirculaire se terminant par deux petites griffes. Le dos est orné d’une ailette allongée à peine prononcée, non décorée. Le corps se termine par un pied rectangulaire, orné d’un grenat parfois absent. Les parallèles les plus pertinents se rencontrent dans les tombes 257, 282, 292 et 308 de Saint-Martin-de-Fontenay dans le Calvados (PILET et alii 1994) et dans les tombes 849 et 908 de Cutry en Meurthe-et-Moselle (LEGOUx 2005, p. 96-97). Ce type de fibules peut être daté du MA1. Huit fibules aviformes appartiennent au type 239 dit de « Schwarzrheindorf » (LEGOUx et alii 2009, p. 38). Elles se localisent par paire dans les tombes 616, 659, 814 et 862 (figure 12). Il s’agit à nouveau de petites fibules faisant entre 2,3 et 3,1 cm de long en alliage cuivreux. Elles se composent d’une tête à œil circulaire ou lentiforme serti d’un grenat parfois absent et d’un petit bec crochu. Le corps est de facture simple, avec sur le ventre une serre à deux ou trois griffes. Sur le dos, on retrouve une ailette allongée et oblique décorée de lignes parallèles dans le sens de la longueur. Le corps se termine par un pied trapézoïdal décoré de plusieurs lignes parallèles. Les meilleures comparaisons se localisent dans les tombes 874 et 887 de Cutry en Meurthe-et-Moselle (LEGOUx 2005, p. 96-97) ce qui permet de dater ce type des phases MA1 et MA2. Deux fibules aviformes font partie du type 242 dit de « Chambly / Vicq » (LEGOUx et alii 2009, p. 38). Ces deux fibules forment une paire provenant de la tombe 874 (figure 12). Mesurant 3,6 cm de long, il s’agit de fibules en alliage cuivreux doré formées d’une tête à œil circulaire serti d’un grenat associé à un petit bec crochu. Le corps allongé est décoré d’une série de chevrons avec sur le ventre une serre à deux griffes triangulaires et un dos suggérant une ailette triangulaire. Le corps se termine par un dos triangulaire orné de lignes parallèles. Les meilleures comparaisons se rencontrent à Chambly dans l’Oise (HAIMERL 1996, pl. 2) et à Marchélepot dans la Somme (KOCH 2001, p. 225 ; figure 13). Une fibule s’intégrant au type 243 (LEGOUx et alii 2009, p. 38) a été découverte dans la tombe 1013 (figure 12). Mesurant 3,6 cm de long, elle est en argent doré et se compose d’une tête semi-circulaire à œil circulaire en creux et à long bec crochu, marqué d’un sillon courbé. Le corps est décoré de plusieurs sillons obliques en creux et d’une ailette détaillée de la même manière, associant sur le ventre une serre repliée tandis que le dos est arqué. Le corps se termine par un pied triangulaire orné d’un motif triangulaire en creux. Les principaux parallèles continentaux pour ce type de fibules, très courant, ont été recensés dans la tombe 375 de Nouvion-en-Ponthieu dans la Somme (PITON 1985, p. 163 et 166) ou encore à Envermeu en Seine-Maritime (LORREN 2001, pl. 1512). Grâce aux différentes comparaisons évoquées, ce type de fibules peut être daté entre le MA1 et le MA2. Trois fibules aviformes font partie du type 244 (LEGOUx et alii 2009, p. 38). En alliage cuivreux, on retrouve une paire dans la tombe 608 et un exemple isolé dans la tombe 962 (figure 12). Mesurant entre 3 et 3,5 cm de long, elles livrent une petite tête circulaire avec un œil plein marqué d’une croix et associé à un long bec crochu marqué d’un sillon. Le corps trapu est traité de la même manière, avec plusieurs sillons parallèles dans le sens de la longueur et sur le ventre, une petite serre à double griffe. Aucune ailette n’est RAIF, 9, 2016, p. 233-260 249 Jean SOULAT VICQ 0 100 200 km 0 100 200 km Figure 13 – Carte de répartition des fibules aviformes des types 242 et 246. [DAO : F. Tessier, d’après KOCH 2001, carte 97, réactualisée] 250 VICQ Figure 14 – Carte de répartition des fibules aviformes du type 248. [DAO : F. Tessier, d’après WERNER 1961, carte 7, réactualisée] RAIF, 9, 2016, p. 233-260 L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence visible, sortant du contour du corps. Un pied trapézoïdal vient terminer la fibule, décoré de plusieurs sillons parallèles. Les comparaisons les plus proches ont été localisées dans la tombe 117 de Noisy-le-Grand en Seine-Saint-Denis (LE FORESTIER et alii 2009, p. 175), à Herpes en Charente ou encore à Aubing (Bavière) en Allemagn (HAIMERL 1996, pl. 4). Ce type de fibule peut être daté du MA1. Une fibule aviforme du type 245 dit de « Westhofen » (LEGOUx et alii 2009, p. 38) a été découverte dans la tombe 1261. Cette fibule en alliage cuivreux mesure 3,3 cm de long (figure 12) et se compose d’une petite tête circulaire représentée par l’œil pointé et associé à un long bec courbe. Le corps trapu est orné d’une série de lignes obliques, avec sur le ventre, une serre longue et repliée. Au dos, une ailette de forme triangulaire est visible. Enfin, le pied trapézoïdal est décoré de deux lignes formant des trapèzes emboîtés. Les meilleurs parallèles se rencontrent dans la tombe 171 de Bulles dans l’Oise ou encore dans la tombe 53 de Westhofen (Rhénanie-Palatinat) en Allemagne (LEGOUx 2011, vol. 1, p. 358). D’après ces exemplaires, ce type de fibule peut être daté du MA2. Retrouvée dans la tombe 1681, une fibule aviforme en alliage cuivreux doré du type 246 dit de « Wanquetin » (LEGOUx et alii 2009, p. 38) a été localisée (figure 12). Mesurant 4,4 cm de long, elle livre une petite tête circulaire représentée par un œil circulaire serti d’un grenat et prolongée par un petit bec crochu marqué d’un sillon et d’une série de triangle. Le corps amandiforme est décoré de plusieurs lignes en relief et de petits triangles en creux, formant l’aile, et associé en partie inférieure à une serre repliée formant également un triangle. Le pied triangulaire est souligné par des lignes emboîtées ornés de petites triangles en creux. Ces fibules sont très courantes le long de la vallée du Rhin et surtout dans le nord de la France avec les exemplaires de Wanquetin, Preures et Saint-Nicolas dans le Pas-de-calais, de Thennes dans la Somme (WERNER 1961, pl. 55, carte 9 ; HAIMERL 1996 ; KOCH 2001) ou encore dans la tombe 214 de Nouvion-en-Ponthieu dans la Somme (PITON 1985, p. 66-67 ; fig. 11). D’après les nombreuses comparaisons, ces fibules peuvent être datées du MA2. Neuf fibules aviformes appartiennent au type 248, associant deux sous-types, le soustype 1 dit de « Brochon » et le sous-type 2 dit de « Aubing » (LEGOUx et alii 2009, p. 38). Elles se rencontrent dans les tombes 438, 622, 735, 881 (figure 12), 1190 et 1930. Des paires se retrouvent dans les tombes 438, 735, 1190 et 1930. Mesurant entre 3,1 et 4 cm de long, ces fibules sont en alliage cuivreux ou en argent parfois doré comme c’est le cas de celles des tombes 438 et 881. Ces fibules se composent d’une tête circulaire au contour festonné, à l’œil circulaire plein et pointé, se prolongeant par un petit bec crochu à sillon. Le corps à dos courbe comporte un décor de sillons parallèles dans le sens de la longueur avec un ventre appuyé par une serre massive à quatre griffes. Entre le corps et le pied, un segment marque la séparation, tandis que le pied trapézoïdal, à contour courbe, est décoré de nombreux sillons formant des rayons. Les comparaisons les plus convaincantes proviennent de Muids dans l’Eure (LORREN 2001, pl. 156), Brochon en Côte-d’Or ou encore Aubing (Munich) en Allemagne (HAIMERL 1996, pl. 1) et peuvent être datées du MA1 (figure 14). Provenant de la tombe 973, la fibule aviforme est du type 250 dit de « Vorges » (LEGOUx et alii 2009, p. 38 ; figure 12). Mesurant 3,2 cm, elle livre une tête massive et arrondie à l’œil circulaire creux qui devait être serti d’un grenat ou d’une verroterie, et se terminant par un petit bec crochu à sillon. La tête et le corps de forme triangulaire sont décorés de sillons parallèles dont le centre est muni d’un rectangulaire vide. Le corps triangulaire livre un dos à ailette et un ventre avec une serre massive qui touche l’extrémité du bec. Le pied de forme trapézoïdale est orné de plusieurs triangles emboîtés. Des parallèles très courants sont présents notamment à Herpes (Charente) mais aussi dans l’Aisne comme à Sablonnière, Brény ou encore Vorges (WERNER 1961, pl. 54, carte 8 ; HAIMERL 1996, pl. 16). D’après la grande quantité de fibules de ce type recensée, ces exemplaires peuvent être datés des phases de la fin MA1 à MA3. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 251 Jean SOULAT Quatre fibules des tombes 584 et 1264 sont en alliage cuivreux doré et appartiennent à une variante du type Jamiolle (HAIMERL 1996 ; figure 12). Mesurant entre 3,1 et 3,2 cm de long, la tête est munie d’un double bec crochu, un court au-dessus et un long sur le côté. L’œil circulaire est serti d’un grenat rond. Le corps est trapézoïdal se terminant par un pied également trapézoïdal. Le dos est associé à une ailette triangulaire tandis que le ventre est souligné par une serre à double griffes. Le corps est marqué par un champ semi-circulaire orné de triangles en creux et d’un décor biseauté, lequel est également présent sur le pied. Il apparaît que la meilleure comparaison se localise à Kärlich (RhénaniePalatina) en Allemagne et Jamiolle (Namur) en Belgique (HAIMERL 1996, pl. 4). Ces fibules peuvent être datées des phases MA1-MA2. Enfin, la paire de fibules de la tombe 756 ne ressemble à aucun autre type connu à ce jour en Gaule (figure 9). Ces fibules sont en argent doré et mesurent 3,6 cm de long. La tête a livré un œil circulaire serti d’un grenat et un bec long et crochu. Le corps est de facture travaillée avec un contour courbe rappelant une sorte d’hippocampe. Le ventre se distingue par un contour ondulé, formant une sorte de S, dont la volute rappelle la serre de l’oiseau, tandis que le dos est arrondi. Le corps se termine par un pied trapézoïdal. La tête ainsi que le pied sont décorés de quatre lignes parallèles dont deux ornements perlés. Les fibules discoïdes et en rosette 252 Deux fibules discoïdes cloisonnées du type général 207 (LEGOUx et alii 2009, p. 37) sont à noter. Cependant, pour être plus précis, la première fibule qui provient de la tombe 682 appartient au type C5 de la typologie de Vielitz (viELITZ 2003, p. 249). Mesurant 3,8 cm de diamètre, elle se compose d’un champ circulaire central associé à une croix Saint-André serti de verroterie. Ces champs sont séparés par des segments en alliage cuivreux. La partie à verroterie repose sur une platine en fer avec système d’attache au revers. L’ensemble est recouvert de reste de textile minéralisé. La seconde fibule est issue de la tombe 1379 et appartient au type A4 de Vielitz (viELITZ 2003, p. 32). Mesurant 2,3 cm de diamètre, elle se compose d’un champ circulaire central autour duquel s’articulent huit rayons livrant des champs trapézoïdaux, l’ensemble étant serti de grenats. Une collerette en fer est visible sur le contour de l’objet. Au revers, une platine en fer est présente dont le système d’attache est réparé par une tôle en alliage cuivreux. Les deux exemplaires font partie d’un type très courant dans la vallée rhénane et dans le nord de la France. Ces fibules peuvent être datées des phases MA1 et MA2. Une seule fibule cloisonnée en rosette du type 215 et plus précisément du type B1 (viELITZ 2003, p. 34) a été retrouvée dans la tombe 1193. Mesurant 2 cm de diamètre, elle se compose de huit pétales. Associé à un fragment de force en fer, l’objet a été très corrodé. L’absence de restauration ne permet pas de distinguer la présence de verroteries ou de grenats. Au revers, on perçoit la platine en alliage cuivreux avec le système d’attache. Comme les précédentes, ces fibules sont très courantes dans le nord de la France et dans la vallée rhénane et peuvent être datées des phases MA2 et MA3. Les fibules quadrilobées Sept fibules quadrilobées ont été inventoriées au sein de cinq tombes : 370, 897, 1054, 1291 et 1359. Les tombes 370 et 1054 livrent une paire de fibules et trois types différents apparaissent : 211, 212 et 213. La fibule quadrilobée de la tombe 1359 appartient au type 211 (LEGOUx et alii 2009, p. 37 ; figure 15). Mesurant 2,5 cm de long, cette fibule en alliage cuivreux se compose d’un carré à angles bilobés, marqué au centre par plusieurs carrés emboîtés, à l’intérieur desquels RAIF, 9, 2016, p. 233-260 L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence se trouve un cercle concentrique. Chaque angle bilobé est orné d’un cercle concentrique. Les parallèles, pour ces fibules, sont très courants comme dans le nord de la Gaule, en Picardie et le long du Rhin (WERNER 1961, pl. 53, carte 7) mais également dans le sud-est de l’Angleterre (SOULAT 2015, vol. 1, p. 166), ce qui montre une large diffusion de ce type. Ces fibules peuvent être datées du MA1. Quatre fibules quadrilobées attribuées au type 212 ont été retrouvées dont une dans la tombe 897 (figure 15), deux dans la tombe 1054 (figure 15) et une dernière dans la tombe 1291. En alliage cuivreux simple ou argent doré, ces fibules mesurent entre 2,3 et 3,1 cm de long. La fibule de la tombe 897 est en argent doré et se compose de quatre champs circulaires en taille biseautée, s’articulant autour d’un losange. Chaque angle bilobé, marqué d’un petit cercle, est serti d’un grenat. La paire de fibules de la tombe 1054 est également en argent doré et est constituée de quatre champs en quart de cercle en taille biseautée. Ces champs sont séparés par un motif cruciforme, orné de triangles niellés, dont le centre et chaque extrémité, formant les angles bilobés, sont sertis de grenats circulaires. Enfin, la fibule de la tombe 1291 est en alliage cuivreux, de facture plus simple que les précédentes. Elle présente quatre grands cercles concentriques associés à cinq petits autres cercles dont quatre forment les angles bilobés externes. Comme pour le type 211, ces fibules se localisent très couramment dans le Nord-Pas-de-Calais, en Picardie comme dans la tombe 440 de Nouvion-en-Ponthieu dans le Somme (PITON 1985, p. 185-186) ou dans la tombe 293 de Bulles dans l’Oise (LEGOUx 2011, p. 80) et dans le sud de la vallée du Rhin (WERNER 1961, pl. 53, carte 6 ; KOCH 1993, fig. 71, p. 59) ainsi que partiellement dans le sud-est de l’Angleterre (figure 16). Ces fibules, bien connues, peuvent être datées du MA1. 253 Figure 15 – Vicq (Yvelines), « le Radet, les Terres à Froment ». Quelques autres types de fibules. [© J. Soulat] 1 cm (1/1) RAIF, 9, 2016, p. 233-260 Jean SOULAT VICQ Argent Bronze 0 100 200 km 0 100 200 km Figure 16 – Carte de répartition des fibules quadrilobées du type 212. [DAO : F. Tessier, d’après KOCH 1993, fig.71, p. 59, réactualisée] 254 VICQ Figure 17 – Carte de répartition des fibules en S du type 229. [DAO : F. Tessier, d’après KOCH 2001, réactualisée] RAIF, 9, 2016, p. 233-260 L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence Enfin, la paire de fibules de la tombe 370 fait partie du type 213 (LEGOUx et alii 2009, p. 37 ; figure 15). Toutes les deux en argent doré et faisant 2,2 cm de diamètre, ces fibules se composent de quatre chefs d’oiseaux faites d’un œil circulaire serti d’un grenat associé à un petit bec crochu. Les quatre éléments s’articulent autour d’un champ circulaire plus gros que les autres serti d’un grenat. Ce type de fibule se rencontre majoritairement au nord du Bassin parisien, entre la basse vallée de l’Escaut et la vallée de la Marne (KOCH 2001). Il peut être daté du MA1 (LEGOUx et alii 2009, p. 37 et 55). Les fibules en S Une paire de fibules en S appartenant au type 229 dit de « Cléry » (LEGOUx et alii 2009, p. 38) se rencontre dans la tombe 1169. En alliage cuivreux, ces deux fibules mesurent 2,5 cm de long. Elles se composent de deux têtes zoomorphes en symétrie inversée, réunies par un corps aux extrémités arrondies dont l’intérieur est décoré d’une série de chevrons. Ce type de fibule est relativement bien représenté notamment dans le nord de la France et la vallée du Rhin (WERNER 1961, pl. 56, carte 11 ; KOCH 2001 ; figure 17). Les parallèles les plus proches se rencontrent dans le Calvados comme dans la tombe 39 de Hérouvillette (DECAENS 1971, p. 73) et dans la tombe 19, 90 et 95 de Sannerville (PILET et alii 1992, pl. 4, 25 et 26). D’après les comparaisons évoquées, ce type de fibules peut être daté du MA2. Les fibules en cavalier Une paire de fibules dites « en cavalier » a été découverte dans la tombe 618 (figure 15). Mesurant 2,2 cm de long, elles sont toutes les deux en argent doré. Ces fibules sont constituées d’un personnage à tête ovoïde aux yeux ovalaires et à la bouche ouverte dont la main gauche tient le harnais du cheval. Ce dernier, très stylisé, se compose d’une tête, au gros œil circulaire serti de grenat, associée à un cou strié et se terminant par quatre pattes reposant sur une plate-forme. Au revers, la fibule est plate avec le système d’attache. Ce type de fibule se rencontre à plusieurs reprises sur le continent notamment dans le nord de la France à Saint-Nicolas dans le Pas-de-Calais, à Arcy-Sainte-Restitue, à Monceau-leNeuf ou encore à Brény dans l’Aisne (WERNER 1961, pl. 55, carte 10 ; figure 18). D’après les nombreuses comparaisons, ce type de fibules peut être daté du MA1. ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES FIBULES Représentation et diffusion Comme évoqué précédemment, les fibules de Vicq se distinguent par leur grande quantité, chiffre unique en France voire en Europe. Les types représentés sont à la fois très courants pour le nord de la France et la vallée rhénane tandis qu’ils sont plutôt rares dans le Bassin parisien. De plus, il faut souligner la présence de certaines fibules ansées digitées, quasiment absentes en France comme les quelques fibules aux influences étrangères. La concentration de fibules à trois digitations et de fibules étrangères est caractéristique de la période d’occupation la plus précoce de la nécropole, datée de la seconde moitié du ve siècle. Les petites fibules à trois digitations se rattachent à des types bien représentés au nord du Bassin parisien, en Picardie et dans le nord de la France. C’est également le cas de la paire de fibules dites « en cavalier », caractéristique de ces régions, et datée du dernier tiers du ve siècle. A contrario, l’association d’une douzaine de fibules ansées à cinq digitations, d’une quarantaine de fibules aviformes, de sept fibules quadrilobées, de trois fibules cloisonnées discoïdes et en rosette apparaît comme plus classique pour la moitié nord de la France et correspond à ce que l’on perçoit en Picardie, en Normandie ou dans RAIF, 9, 2016, p. 233-260 255 Jean SOULAT VICQ 0 Figure 18 – Carte de répartition des fibules dites « en cavalier ». [DAO : F. Tessier, d’après WERNER 1961, pl. 55, carte 10, réactualisée] 256 l’Est, mais jamais en si grandes proportions. Ces différents exemplaires se rassemblent autour d’une même période entre la fin du ve et le milieu du vie siècle. Enfin, les quelques fibules ansées symétriques sont propres au milieu du viie siècle. Quelques fibules aux influences étrangères Treize fibules ansées d’influences étrangères ont été mises en évidence à Vicq. Parmi elles, on compte deux fibules ansées à cinq digitations de type gépide dans la tombe 115, une fibule ansée à tête triangulaire et corps losangique de type germanique voire saxon dans la tombe 504, une paire de fibules ansées à trois digitations au placage d’argent de type wisigoth dans les tombes 756 et 962, une paire de petites fibules ansées symétriques à trois digitations et à verroteries de type thuringien dans la tombe 851, une paire de fibules en arbalète de type wisigoth dans la tombe 1924 et enfin deux fibules ansées à sept digitations de type lombard dans la tombe 1930. Faisant partie des phases les plus anciennes de la nécropole, entre la seconde moitié du ve et le premier tiers du vie siècle, ces fibules sont à associer à d’autres éléments de type exogène comme les six plaques-boucles de type wisigoth, les deux autres de type méditerranéen, la céramique de tradition anglo-saxonne ou encore l’aiguière d’influence méditerranéenne voire africaine. Au sein des influences étrangères perceptibles à travers RAIF, 9, 2016, p. 233-260 100 200 km L’étude typochronologique des fibules de Vicq (Yvelines) : une véritable collection de référence ce mobilier, ce sont les éléments de type wisigoth qui sont les plus nombreux. Ces objets sont découverts dans des tombes essentiellement féminines, ce qui vient alimenter un phénomène bien connu dans les nécropoles du nord de la France comme c’est le cas à Nouvion-en-Ponthieu (Somme), Bulles (Oise), Frénouville (Calvados) ou encore SaintMartin-de-Fontenay (Calvados). À titre de comparaison, les fibules de type wisigoth se rencontrent dans les nécropoles de Picardie et de Normandie, tandis que les fibules de type thuringien se localisent également en Picardie mais surtout dans le Nord-Pas-de-Calais. Évidemment, les fibules de type gépide et de type lombard restent très rares en France. Les tombes à trois ou quatre fibules Parmi les 36 tombes livrant des fibules, on en retrouve quatre avec deux paires de fibules différentes et une autre tombe avec trois fibules. La tombe 689 a livré une paire de fibules ansées à trois digitations du type Bulles / Lauriacum associée à une paire de fibules ansées à cinq digitations du type 264 dit de « Douai ». La défunte de la tombe 689 propose une association à ce jour inédite, avec deux paires de fibules caractéristiques du Nord de la France. Cet assemblage permet de dater la tombe du dernier tiers du ve siècle, soit du début du MA1. La tombe 756 apporte une paire de fibules ansées à trois digitations et à placage d’argent de type wisigoth et une paire de fibules aviformes d’un type inconnu. Notons que cette association se complète par une plaque-boucle cloisonnée de type wisigoth. La présence de trois objets de type wisigoth, de très belle facture, suppose l’inhumation d’une défunte d’origine wisigothique ayant un statut social privilégié. Renforçant cette hypothèse, la découverte d’une paire de fibules aviformes au style atypique unique en France, mais qui s’inscrit bien dans la lignée des fibules aviformes mérovingiennes, montre peut-être un acte d’acculturation à la culture matérielle locale. Il pourrait ainsi s’agir de la volonté propre de l’individu, conservant cet affichage porté de son vivant et l’accompagnant lors de son inhumation. Mais on ne peut écarter le rôle de la famille, qui a pu intervenir lors de la préparation du corps, en intégrant ces deux fibules locales comme témoignage de son intégration. Cette idée est appuyée par la présence de deux paires de fibules, caractéristiques de la mode vestimentaire en Gaule dès la deuxième moitié du ve siècle. Cet assemblage peut ainsi être daté de la deuxième moitié du ve siècle, soit de la fin de la phase PM. La tombe 814 a livré une paire de fibules ansées à cinq digitations du type 269 et une paire de fibules aviformes du type 239. Il s’agit ici d’un assemblage relativement classique et typique de la mode vestimentaire mérovingienne à deux paires de fibules. La paire de fibules ansées vient fermer le manteau ou la tunique, tandis que les petites fibules aviformes attachent le vêtement du dessous. Ce mobilier peut être daté du milieu du vie siècle, soit du début du MA2. La tombe 962 offre une paire de fibules ansées à trois digitations et à placage d’argent de type wisigoth et une fibule aviforme du type 244. Cet assemblage offre un bon exemple d’acculturation similaire à celui de la tombe 756. En effet, on retrouve la paire de fibules ansées de type wisigoth associée à une petite fibule aviforme typiquement mérovingienne. La présence de ces trois fibules permet de dater la tombe du dernier tiers du ve siècle, c’est-à-dire de la fin du PM ou du début du MA1. Enfin, la tombe 1930 comporte une paire de fibules ansées à sept digitations de type lombard et une paire de fibules aviformes du type 248. La présence de ces fibules permet, une fois de plus, de s’interroger sur la pratique d’une possible acculturation de la part de la défunte. Les deux fibules ansées de type lombard associées aux deux fibules aviformes typiquement mérovingiennes montrent très probablement la volonté d’adopter la mode vestimentaire locale. Le mobilier suggère une datation de la tombe de la fin du MA1, soit entre les années 520-530. RAIF, 9, 2016, p. 233-260 257 Jean SOULAT RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ABERG N. (1923) - Die Goten und Langobarden in Italien, Uppsala, 184 p. AENNART H., SOULAT J. 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